La production, le trafic et la consommation de médicaments falsifiés constituent une menace pour la sécurité et la santé publiques. Les médicaments falsifiés sont des produits médicaux dont l’identité, la composition ou la source est représentée de façon trompeuse, que ce soit délibérément ou frauduleusement. Dans certains cas, ils peuvent contenir des ingrédients toxiques ou dangereux pour la santé. En conséquence, ils peuvent ne pas guérir, s’avérer nocifs, voire provoquer la mort des consommateurs. Bien qu’aucun pays ne soit protégé contre cette menace, l’impact est particulièrement important dans les pays en développement où l’on retrouve des médicaments falsifiés dans le traitement de maladies potentiellement mortelles telles que le paludisme, la tuberculose et le VIH/SIDA.
Selon l’Organisation mondiale de la Santé, les médicaments falsifiés et de qualité inférieure représenteraient entre 10 et 15 % du marché mondial du médicament ; dans certaines régions d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, les médicaments falsifiés peuvent représenter jusqu’à 60 % des médicaments en circulation.
L’attrait de bénéfices financiers élevés, conjugué au faible risque de poursuites et à la relative clémence des peines, fait de la production et du trafic de médicaments falsifiés un business intéressant pour les groupes criminels. Cette industrie parallèle représente aujourd’hui plusieurs milliards de dollars.
La lutte contre les produits pharmaceutiques falsifiés se heurte à plusieurs défis :
D’importants progrès ont été réalisés, notamment dans la sphère juridique avec par exemple la Convention MEDICRIME, signée à Moscou en 2011. Cette convention a un double objectif, d’une part protéger les patients vulnérables et leur droit à un accès sécurisé à des médicaments de qualité satisfaisante, et d’autre part lutter contre le crime organisé. Autre exemple, la Déclaration de Zanzibar sur les médicaments contrefaits et le crime pharmaceutique de 2010, par laquelle le Burundi, le Kenya, le Rwanda, la Tanzanie et l’Ouganda se sont engagés à renforcer la lutte contre la contrefaçon de médicaments et d’autres crimes pharmaceutiques en Afrique de l’Est.
Dans le cadre de l’initiative des Centres d’Excellence pour la réduction des risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (NRBC), l’Union européenne a souhaité s’engager sur la thématique de la lutte contre les médicaments falsifiés en Afrique de l’Est et du Centre avec la mise en place du projet MEDISAFE. Le projet couvre les 11 États suivants : le Burundi, l’Éthiopie, le Ghana, le Kenya, le Malawi, l’Ouganda, la République Démocratique du Congo, le Rwanda, les Seychelles, la Tanzanie et la Zambie.
Sélectionnée par la Commission européenne pour mettre en œuvre le projet MEDISAFE (Projet 66), Expertise France, l’agence française de coopération technique internationale, est à la tête d’un consortium européen de 5 partenaires : APRO-PHISP (Association professionnelle des pharmaciens inspecteurs de santé publique), ASST Fatebenefratelli Sacco (Association de quatre CHU de la région Lombardie), CHMP (Centre humanitaire des métiers de la pharmacie), CIOPF (Conférence Internationale des ordres des Pharmaciens Francophones) et ReMed (Réseau Médicament et Développement).
En janvier 2017, 113 millions de médicaments potentiellement dangereux et illicites (d’une valeur estimée à 52 millions d’euros) ont été saisis lors d’une opération appelée Action contre la contrefaçon et les médicaments illicites (ACIM) qui a été menée dans 16 pays africains en septembre 2016, dont 4 des pays bénéficiaires de MEDISAFE : République Démocratique du Congo, Ghana, Kenya et Tanzanie. Cette opération de 10 jours a été organisée conjointement par l’Organisation mondiale des douanes (OMD) et l’Institut international de recherche contre les médicaments contrefaits (IRACM). Les saisies les plus importantes ont eu lieu au Nigeria, en République du Bénin, au Kenya et au Togo. Une étude menée dans 21 pays d’Afrique subsaharienne a conclu que 20 % des médicaments antipaludiques étudiés étaient classés comme falsifiés. Une autre étude également menée dans les pays d’Afrique subsaharienne sur la cause de la mortalité associée à des médicaments de mauvaise qualité a révélé que 122 350 enfants de moins de 5 ans sont morts en 2013 uniquement en raison de la dépendance à des médicaments antipaludiques de mauvaise qualité.